Canalblog
Editer la page Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Body Double

It follows, David Robert Mitchell (2015)

409431

Genre : pas de cynisme

 

Second film du réalisateur de The Myth of the American Sleepover, sorti directement en DVD dans nos contrées, It Follows a fait sensation à Deauville et à Gérardmer comme un renouveau dans le genre du film d’horreur. Qu’en est-il vraiment ?

S’inspirant de Black Hole de Charles Burns, on suit une adolescente Jay (Maika Monroe) vivant à Détroit qui va coucher avec son petit ami Hugh (Jake Weary) un soir dans sa voiture. Par la suite, celui-ci va lui expliquer qu’il lui a transmis une sorte de malédiction  qui pousse une créature multiforme à détruire la dernière personne porteuse de celle-ci. Le seul moyen de s’extirper de cette poursuite mortelle est de la transmettre à son tour à un tiers en couchant avec lui ou elle.

Au jeu des influences, beaucoup ont cité Carpenter, la saga Freddy ainsi tout un cinéma fantastique/horreur des années 70/80. Mais ce second opus est avant tout un film de David Robert Mitchell tellement il semble être une version plus frontale de son premier film.

John Carpenter infuse l’oeuvre du cinéaste américain mais pas nécessairement par son rapport au fantastique mais surtout des choix de cadre, d’ambiance. En effet, dans The Myth of the American Sleepover, Mitchell laisse planer une atmosphère à la lisière de l’extraordinaire tout en traitant des émois adolescentes avec une douceur cotonneuse. It follows construit donc une oppression et une paranoïa constante en jouant sur le hors champ. A l’aide de travelling circulaire balayant l’environnement de son héroïne, le réalisateur fait participer activement le spectateur à l’angoisse de Jay. Jouant sur les attentes du spectateur (comme la scène de la plage), le réalisateur désamorce les règles du genre pour mieux les redynamiser. Il ne les réinvente pas, il les remet au coeur du récit comme un moyen et aussi une fin (le fait d’avoir peu).

 

Dans un contexte où le film de genre devient avant tout l’occasion d’y avoir un oeil ironique voire cynique, Mitchell prend au sérieux son procédé redonnant une nouvelle conviction à ce type cinématographique. Le choix d’une musique omniprésente participe de cette oppression constante mettant les nerfs du spectateur à rude épreuve sans jamais utiliser des « jump scare » faciles. It follows est remarquable dans sa gestion de l’espace. En ce sens, le film est dépositaire d’une certaine vision et caractéristique du cinéma de Carpenter. En somme, tout le monde est suspect de renfermer la « bête » qui conduira à la perte de l’adolescente. Dans son malheur, elle va être épaulée par sa soeur, Paul (son ami d’enfance), Greg et Yara. Le film va donc nous narrer une couse-poursuite sans fin tournant en rond vu qu’aucun lieu ne peut arrêter la créature.

 

Une des grandes forces du long-métrage est de ne jamais expliquer les origines du mal ni à jamais à pousser ses personnages à le comprendre. Cette menace devient donc inéluctable et surtout omniprésente. Mais paradoxalement, Jay est la seule à la voir se retrouvant alors dans une solitude d’autant plus forte alors que son entourage essaye de la soutenir. Contrairement au slasher classique, il n’est pas ici question de massacrer les personnages secondaires pour créer une tension dramatique factice. Bien au contraire, ce second plan est avant tout l’occasion  d’étudier les relations entre les jeunes.

A l’image de la première oeuvre de Mitchell, il s’agit avant tout par une métaphore horrifique d’étudier et de voir évoluer les connivences au sein de la bande d’adolescents. Car au fond, le film nous narre avant tout la création d’un lien entre Paul et Jay que le final met en exergue.

 

Loin d’une vision puritaine du sexe, It follows parle de la fin d’une époque, celle de l’enfance avec l’entrée dans la sexualité mais aussi irrémédiablement la course vers la mort. Le fait de coucher pour contrer la malédiction est avant tout une pulsion de survie qui se transmet à d’autres mais aussi à plus grande échelle vers les prochaines générations.

Le premier film de Mitchell esquissait aussi par touche cette perte d’innocence conduisant à un monde troublée et troublant. It follows ne fait que prolonger ces germes de façon plus brutale en utilisant les armes du film de genre. Au fond, il concrétise ses envies de premier film. Les citations de l’Idiot de Dostoïevski  restent par ailleurs une explication de texte de l’entreprise menée. On pourrait donc reprocher à Mitchell de ne pas faire assez confiance à ses images par moment. De la même façon, la séquence au sein de la piscine brise la solitude de Jay et se veut plus démonstrative que le reste du film. Ainsi, le réalisateur fait des concessions à son projet afin d’insuffler un certain espoir à son final. Car bien que la fin soit ambiguë, la menace sourde en présence semble presque devenu secondaire face au fait qu’un couple s’est formé face à l’adversité (comme une forme de romantisme macabre).

 

 

Publicité
Publicité
Body Double
Publicité
Pages
Derniers commentaires
Realisateurs

 

 

Publicité